Rajagopalachari fait l'unanimité contre lui parmi les seniors précepteurs. Tandis que les enfants de Babuji l'accusent d'avoir essayé d'empoisonner leur père à différentes reprises et le traitent d'usurpateur, Kasturi le considère comme un manager et dénonce l'idole que ses adorateurs ont fabriquée, Narayana rejette le culte de la personnalité qu'il a contribué à forger autour de lui.
Quand Babuji disait de Kasturi qu'elle était une sainte, il ajoutait aussitôt que Rajagopalachari était "bachelor of science". En effet, ce fumeur de cigarettes occidentales est titulaire d'une licence scientifique et a travaillé dans l'ingénierie chimique avant de diriger des filiales du conglomérat industriel indien TTK & Co de Krishnamachari. Très occidentalisé, cet homme du sud a parcouru le monde à de multiples reprises dans le cadre de son travail, passant deux ans en Yougoslavie ou siégeant dans des Commissions techniques internationales.
Habile chef d'entreprise, Rajagopalachari sait parfaitement diriger les hommes et gérer ses affaires. Il développe des relations fort utiles avec des personnalités indiennes de poids et intègre à son comité des représentants de la justice, des fonctionnaires de police et des entrepreneurs. Il sélectionne ses lieutenants en fonction de leur ambition et de leur arrivisme.
Le 29 avril 2005, Rajagopalachari choisit d'écrire la lettre de nomination de son successeur, Ajay Kumar Bhatter, jeune homme d'affaires du Bengale occidental et membre du Comité exécutif du président depuis 2003, choisi par Babuji et confirmé par la hiérarchie du Sahaj Marg, signature ratifiée par seize autres personnalités. Et Rajagopalachari l'annonce publiquement le lendemain à Tiruppur (Tamil Nadu), à l'occasion des soixante ans de la Mission et le jour même du 106ème anniversaire de la naissance de Babuji, dans un discours intitulé "Securing the Future of the Mission", alors qu'il va sur ses 78 ans.
Alors que l'organisation est nécessaire pour gérer tout ce petit monde, le danger est grand de trop se concentrer sur l'organisation. C'est pourquoi la Mission est guidée dans son travail par une seule et unique personne, à la fois président et représentant spirituel de son Grand Maître Babuji. Cette personne doit donc être choisie avec soin pour s'occuper à la fois des tâches matérielles et du travail spirituel, de même que de sa propre croissance spirituelle. AK Bhatter a été choisi par Babuji, il est entraîné à cela depuis des années et le sera encore durant toute la vie de Rajagopalachari. Il lui succèdera donc comme représentant spirituel de Babuji et président de la Mission partout dans le monde.
Parvenu à l'apogée de son pouvoir, Rajagopalachari a donc nommé son successeur en 2005. L'année suivante, il a repris à peu près tous les ashrams indiens qui ne lui étaient pas inféodés, par la ruse ou par la force, à l'aide de ses hommes de main. Il semble manipuler à son gré les petits-enfants de Lalaji et Babuji que sont Dinaysh et Sarvesh. Il les a inscrit sur sa liste de précepteurs, tout comme Kasturi malgré son désaccord.
Uma Shankar Bajpai et Arokiasamy P Durai, retraité des forces de police, sont ses hommes de main, souvent à l'avant-garde des prises en force d'ashrams et de tous les coups tordus. Son fils unique PR Krishna, le richissime héritier et grand argentier de la Shri Ram Chandra Mission, gère les biens fonciers et immobiliers de la Mission tout comme les siens. Santosh Khanjee, l'éminence grise, organise et administre la Mission.
A côté de cela, il y a aussi les fidèles historiques, ceux qui sont allés le rejoindre en Inde et tous les autres responsables internationaux…
Tous ces individus constituent son cercle rapproché. Certains d'entre eux sont aussi des prétendants à sa succession. Il n'a nommé AK Bhatter en 2005 que pour mieux les calmer, mais ce n'est qu'un pantin. Sa légitimité s'éteindra d'elle-même à la mort de Rajagopalachari. Une légitimité s'acquière, elle ne se décrète pas. D'ailleurs Rajagopalachari lui-même s'en inquiète et le révèle en janvier 2009. Il déclare qu'un cancer ronge le Sahaj Marg de l'intérieur et que son organisation est menacée de désintégration. Il fait des cauchemars où il voit la Shri Ram Chandra Mission se désintégrer en 240 petites missions.
Dans cette course à la succession, son fils unique PR Krishna, avec son petit-fils Barghav et sa petite-fille Madhuri sont bien placés. Mais son éminence grise Santosh Khanjee qui connaît tous ses secrets et qui tient d'une main de fer toute l'organisation et les fondations a aussi ses chances. Du côté des outsiders, le mieux placé est bien évidemment le petit-fils de Babuji, Navneet Kumar Saxena. Mais la récente exposition médiatique du fils du Docteur Varadachari, KC Narayana, laisse supposer qu'il entend bien tirer son épingle du jeu.
Et si Kasturi reste toujours en dehors des jeux de pouvoir, il n'en va peut-être pas de même de ses collaborateurs. Et qu'en est-il de Srinivasa Rao à la tête de la Shri Ram Chandraji Maharaj Seva Trust à Cuddapah ? Quant au petit-fils de Lalaji, Dinaysh Kumar Saxena, que cherche-t-il donc aujourd'hui en s'exposant comme il le fait ?
Rajagopalachari a obtenu un pouvoir financier et une domination sur les hommes tels que les convoitises sont devenues presque trop énormes pour que sa succession se passe sans heurts. Les parts de marché du Sahaj Marg™ et de la SRCM™ en font rêver plus d'un. Et dans ces conditions, Ajay Kumar Bhatter peut être balayé comme un vulgaire fétu de paille…